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mercredi 15 janvier 2014

La tête de veau est en deuil Martinière a fermé

 
Alain et Christiane Martinière ont fermé leur restaurant en fin d'année.
Discrètement, le réveillon a sonné la fermeture du dernier restaurant de Châteauneuf. La fin d’une époque.
Pourquoi y venait-on ? Pourquoi poussait-on la porte du 30, rue du Cygne-Châteauneuf ? Déjà parce qu'on y avait été invité. Car la discrète adresse se méritait : la trentaine de couverts ne permettait pas à tout Châtellerault d'y défiler. C'était un conseil d'amis qu'on se refilait comme une vieille recette de cuisine.
Déjà pendant la guerre
La cuisine, justement. Le gros argument, une légende vivante entretenue depuis des temps immémoriaux. « Mes grands-parents le tenaient déjà pendant la guerre », se souvient Alain Martinière, le « chef ». Alors, en 1977, il a repris la suite avec son épouse Christiane, abandonnant le " Jet d'eau ", leur discothèque qu'ils tenaient dans la Grande-Rue à côté du cinéma Rex.
« A l'époque, c'était un restaurant ouvrier, c'était toujours la même chose, on mettait les fruits et le fromage sur la table. Et la soupe toujours en entrée. » Les jeunes repreneurs modernisent un peu l'affaire. Mais gardent l'essentiel : une cuisine roborative, composée de plats traditionnels, et à un prix défiant toute concurrence. Beaucoup se souviennent avec quelque émotion des boeuf-carottes, des blanquettes ou des choucroutes. Sans parler de la tête de veau. « Il fallait qu'on l'annonce à l'avance », rigole Alain.
Les mousses au chocolat et crèmes brûlées finissaient de mettre tout le monde d'accord, les ouvriers comme les VRP qui s'y croisaient. « Les gens nous disaient qu'ils se sentaient bien chez nous », se félicite Christiane. Le décor désuet et les toiles cirées – remplacées par de vraies nappes ces dernières années – ajoutaient la touche finale : ici, le temps était suspendu tout comme le fumet des plats de grand-mères.
Mais les grand-mères ne sont pas éternelles. Isoroy, Fabris, l'abattoir ont fermé, enlevant autant de clients alors que d'autres partaient vers les zones commerciales où des restaurants modernes fleurissaient. L'arrivée de nouvelles normes a précipité le départ à la retraite des époux Martinière. Sans repreneur pour l'instant. « On ne se fait pas trop d'illusion », commentent-ils, sans trop savoir quel sera leur programme des prochaines années. « On avait toujours quelqu'un avec qui discuter. Ça va nous manquer. » Aux clients aussi, les Martinière manqueront. La tête de veau a perdu deux de ses meilleurs défenseurs.
Laurent Gaudens

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